Maria Aït M’Hamed, présidente de l’Union des agences conseil en communication et cofondatrice de Bonzaï Agency (Ph. Privée)L’Union des agences conseil en communication (UACC) est une association professionnelle qui regroupe 42 agences. Tous réunis, ses membres pèsent pour 85% de l’activité publicitaire. Un marché qui contribue à hauteur de 12 milliards de DH au PIB national. Dans un contexte de mutations économiques, technologiques et de digitalisation, le microcosme est en train de réinventer son modèle économique. Maria Aït M’Hamed, présidente de l’UACC, analyse les enjeux de l’écosystème et les interactions entre agences, médias et annonceurs... - L’Economiste: Dans un contexte de transformation tous azimuts, d’optimisation des budgets, de digitalisation... Comment évolue le microcosme des agences conseil?- Maria Aït M’Hamed: Jamais les marques et les organisations n’ont eu autant besoin de conseil en communication. En effet, nous vivons de profondes mutations économiques, technologiques, sociales et culturelles dont les impacts sur les agences et leur avenir commencent à se faire ressentir. Au sein de l’UACC, nous sommes convaincus que ces transformations représentent des opportunités à condition de faire preuve de résilience, de pro-activité et de créativité. Cela dit, le marché reste dur. Le contexte a de quoi inquiéter, en même temps le microcosme des agences ne cesse d’évoluer et de gagner en compétitivité. Seules les agences professionnelles, structurées et qui offrent une réelle valeur ajoutée peuvent survivre aux profondes mutations.- Le constat aujourd’hui est qu’il y a une pléthore de structures de conseil. A combien s’élève le nombre d’agences opérationnelles et quels en sont les périmètres?- Aujourd’hui, même un imprimeur peut offrir du conseil en communication. Selon les estimations, l’écosystème de la communication regroupe 8.500 PME. L’UACC comprend 42 agences structurées. Les périmètres d’intervention sont aussi larges que variés. Ils dépendent des relations des agences avec leurs clients. A l’UACC, notre mission vise à contribuer à la montée en compétences du secteur, structurer les pratiques de la profession et défendre les valeurs d’éthique, de responsabilité et de juste rémunération dans l’intérêt partagé des marques et des agences conseil.- Comment évaluez-vous les rapports annonceurs/agences dans une conjoncture aussi difficile?- C’est une question fondamentale pour l’avenir des agences conseil. Au vu des mutations, les relations agences-annonceurs doivent être réinventées. L’UACC milite dans ce sens pour l’ancrage de la culture des compétitions responsables et d’une juste rémunération des agences. Nous avons initié en partenariat avec le GAM un chantier sur les relations agences-annonceurs, qui donnera naissance dès la rentrée à un guide des bonnes pratiques ainsi qu’un cycle commun de formation.- Aujourd’hui, il y a de profondes ruptures qui s’opèrent dans l’écosystème du conseil et de la communication en général... comment réinventer le modèle?- Il n’y a pas de recette universelle. Chaque agence doit trouver son propre modèle. Ici comme ailleurs, c’est une phase délicate que vivent les agences conseil en communication. Bousculées de partout et faisant l’objet de fortes pressions, elles n’ont le choix que de s’adapter en enclenchant des ruptures profondes dans l’exercice du métier. - Est-ce que l’agence a le monopole du conseil? Car il y a d’autres acteurs qui interviennent dans les mêmes périmètres...Le conseil est le nerf de la guerre. Ce n’est pas un hasard si le cabinet international Accenture s’est offert l’agence new-yorkaise Droga 5, dont le fondateur est le créatif le plus récompensé au monde. L’agence est bousculée dans ses principaux périmètres d’intervention. Et c’est aux agences de retrouver leur légitimité première, à savoir le conseil et son ADN, la créativité. - Quid des rapports entre les agences et les médias ou encore annonceurs-médias? - A l’UACC, nous militions pour des relations de transparence afin de servir les intérêts des trois acteurs-clés de l’écosystème, à savoir les annonceurs, les agences et les médias. Avec le GAM, nous avons développé des relations et des partenariats privilégiés sur des sujets importants pour la profession. Pareil avec nos partenaires des médias.- Le digital apporte plein de ruptures, de déperditions mais aussi des rebondissements heureux. Est-ce une menace ou une opportunité?- Le digital offre des opportunités aussi bien pour les agences que les marques, que ce soit en termes de réflexion stratégique ou de création. Ce n’est pas un hasard si les investissements publicitaires dans le digital ne cessent d’augmenter. Ce canal challenge quotidiennement les agences et les marques. Plus qu’un support, le digital s’est imposé comme une culture, une manière différente de faire la communication. Il permet d’expérimenter de nouvelles voies, d’établir un dialogue entre les marques et les consommacteurs. - Qu’est-ce que cela implique au niveau des agences en termes de redéploiements organisationnels, de mise à niveau...?- L’impact du digital est tel que la réorganisation des agences n’est plus un luxe. Les agences n’ont plus le choix. Elles sont appelées à mener leur propre transformation. D’où la nécessité de se doter de profils qualifiés, mettre en place un encadrement à la hauteur des enjeux et investir dans le perfectionnement des équipes. Là encore, la question de la juste rémunération se pose avec acuité. Les mots d’ordre sont à la transparence et à la revalorisation.